« Et si, dans l’espace d’un instant, tout un être pouvait se transformer?
Et si, sans qu’on ait rien demandé, la magie se décidait à ‘opérer’ pour nous rendre plus adultes, plus matures, des gens meilleurs? Je crois que j’ai vécu ce moment là. Je crois que, pouf, dans mon esprit, tout s’est mit à changer. Certains diraient pour le mieux. Pourtant, ceux qui ont une éternelle âme d’enfants diraient pour le pire. Mais qu’est-ce qui détermine qu’ont ait une âme d’enfant où une âme d’adulte? Notre manière de penser, de voir les choses? De parler et d’agir? Ou on dit tout simplement à une personne : ‘Toi, tu es un enfant, tu as toujours été un enfant et tu resteras toujours un enfant.’ Est-ce l’influence intérieure, faite par soi-même, ou est-ce celle qui vient de l’extérieur qui détermine qu’on devienne adulte ou non? Est-ce en étant traité comme un enfant qu’on le reste toute sa vie? Ou est-ce en étant traité dès le départ comme un adulte qu’on le devient? »
Emily referma son calepin et posa une main sur son front. Se poser tant de question lui avait toujours donné mal à la tête. Pourtant, elle ne pouvait s’empêcher de se les poser. De les consigner dans son petit calepin pour y répondre dans ses temps perdus. Toutes sortes de questions existentielles, sur l’amour, sur l’adolescence, l’âge adulte, le sexe, l’économie, la politique même, les inégalités sociales, s’entassaient sur les lignes de ce petit ouvrage, au départ pâle et dépourvu d’écriture, lorsqu’elle l’avait reçu. Sa mère était à l’époque loin de se douter que ce calepin serait rempli de ces questions, parfois sombres, parfois plus heureuses. Son fort intérieur lui avait toujours montré la voie via l’écriture. Voilà pourquoi c’était devenu sa passion. Elle n’avait pas nécessairement envie de devenir romancière ou quelque chose du genre. Mais écrire la relaxait, même si ces ébats intérieurs pouvaient n’intéresser absolument personne. La jeune fille avait même songé à écrire un bouquin philosophique pour comprendre les différentes façons de penser des gens face à toutes ces questions mais ce projet s’était rapidement évanoui lorsqu’elle s’était rendu à l’évidence que jamais personne ne serait en mesure de répondre à tant de questions sur tant de sujets différents.
Enfin bref. Elle se retrouvait donc sur un banc de parc, endroit privilégié pour écrire à la mitaine sans entendre le bruit dérangeant de la machine à coudre de Maman et les ronchonnements de Papa qui faisait les comptes de son entreprise. C’était un endroit parfait pour s’évader de l’atmosphère pesante de la maison familiale, appart l’école. Parce qu’aller à l’école la fin de semaine n’est pas chose qu’on recommande à tout le monde pour fuir sa propre maison, elle se retrouvait souvent dans le parc, à toute heure du jour ou de la nuit, pour se détendre et regarder le paysage plutôt simplet sans bouger. Paysage simplet mais de toute beauté, surtout à l’automne. Pourtant, rendu en février, le paysage devenait un peu étrange. Mélange incroyable de pluie et de neige, on se retrouvait parfois avec des patinoires à la place des rues. Cette journée là, pourtant, mère nature avait décidé d’être clémente et de ne donner à Dyes Iray rien de plus que le domaine avait déjà, c'est-à-dire une fine couche de neige au sol et un ciel un peu gris. Un peu morne, penseront certains. Pourtant, allez savoir pourquoi, Emily pensait qu’il pouvait toujours y avoir de la beauté dans un paysage qui à première vue peut sembler un peu morne. De son banc de parc, elle avait sous les yeux une peinture vivante, qui bougeait au gré du temps et du vent. Voilà pourquoi elle appréciait grandement le parc. Et, elle l’ignorait peut-être pour l’instant mais ce tableau vivant allait de nouveau changer pour prendre une autre forme suite à la venue de quelqu’un qui, peut importe son identité, pouvait jouer à sa guise un rôle important ou non dans cette peinture tridimensionnelle…
(Gros ramassis de n’iiiimporte quoi.)
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